L’objectif de tout sportif est d’améliorer sa condition physique, de gagner en force et en vitesse. Mais comment faire en sorte que votre corps s’adapte à l’entraînement de manière efficace et rapide ? L’entraînement par intervalles représente une solution scientifiquement validée pour optimiser vos résultats.
Des décennies de recherche en sciences du sport ont démontré qu’en alternant des périodes d’effort intense avec des périodes de repos, vous permettez à votre corps de réaliser un volume de travail de qualité supérieure en moins de temps. Cette approche favorise des gains plus rapides :
- en VO2 max,
- en puissance aérobie,
- en performance globale.
Cependant, tous les intervalles ne se valent pas. Il existe différents types d’intervalles ciblant des zones d’entraînement spécifiques, chacune produisant des adaptations physiologiques uniques.
Comprendre l’entraînement par intervalles
Contexte historique et scientifique
Historiquement, la recherche en physiologie de l’exercice s’est d’abord concentrée sur l’entraînement continu d’intensité moyenne ou faible, où l’on maintient une intensité sous-maximale (environ 65-70% du VO2 max) pendant de longues périodes.
Les scientifiques ont ensuite exploré une approche différente : augmenter considérablement l’intensité au-delà du seuil ou même du VO2 max, puis récupérer, permettant ainsi d’accumuler plus de travail de qualité et potentiellement plus d’adaptations.
Une méta-analyse norvégienne portant sur 425 études d’exercice a comparé les effets de l’entraînement continu et par intervalles. Les résultats révèlent des différences importantes selon le type d’entraînement :

- Sprint Interval Training (SIT) : Efforts très intenses de 10 à 60 secondes suivis de longues périodes de repos. Ce type d’entraînement produit une augmentation massive du VO2 max durant les 2-3 premières semaines, puis la progression se stabilise.
- High-Intensity Interval Training (HIT) : Cette approche combine le meilleur des deux mondes. Les efforts sont intenses mais légèrement moins que le SIT, autour des niveaux de VO2 max ou proche du seuil lactique. L’augmentation du VO2 max est progressive et se poursuit jusqu’à 12-13 semaines.
- Entraînement d’endurance (ET) : Progression plus graduelle avec des effets longitudinaux sur la capillarisation et la distribution sanguine vers les muscles.
Le VO2 max constitue un excellent indicateur de la capacité cardiovasculaire et de la puissance aérobie globale, c’est-à-dire la quantité d’énergie que le système aérobie peut produire en utilisant l’oxygène.
Résultats intéressants : tous les protocoles testés (HIIT, SIT, RST, endurance continue) améliorent le VO2max, avec HIIT légèrement supérieur en efficacité puis SIT, mais sans différence statistiquement significative entre HIIT, SIT et RST. Les meilleures progressions sont observées sur des durées courtes-moyennes (2 à 6 semaines) et avec des schémas d’effort/récupération optimisés.
Le modèle des zones d’entraînement
Les cinq (ou six) zones d’intensité
Pour comprendre les nuances de l’entraînement par intervalles, il est essentiel de se référer au modèle des zones d’entraînement.
Ces zones sont définies selon l’intensité de l’exercice, généralement exprimée en pourcentage de la fréquence cardiaque maximale, bien que cette méthode ne soit pas parfaite.
La courbe du lactate, superposée à ces zones, offre une meilleure représentation. Le lactate étant un sous-produit de la glycolyse, son accumulation progressive indique une production d’énergie anaérobie accrue provenant du système glycolytique.
- Zone 1-2 : Production d’énergie majoritairement aérobie, lactate faible
- Zone 3-4 : Zone intermédiaire avec un mélange d’énergie aérobie et anaérobie
- Zone 5 : Intensités élevées approchant la capacité aérobie maximale (VO2 max)
- Zone 6 : Efforts bien au-delà du seuil ou du VO2 max, particulièrement pertinents pour les sports fonctionnels

Une meilleure mesure : le FTP (Functional Threshold Power)
Plutôt que de se baser uniquement sur la fréquence cardiaque, le pourcentage de votre FTP (puissance au seuil fonctionnel) offre une mesure plus précise de l’intensité d’exercice.
Le test FTP se réalise ainsi :
- Échauffement intense de 5 minutes
- Repos de 2-3 minutes
- Effort maximal de 20 minutes en notant la puissance moyenne en watts
Cette valeur se rapproche du seuil lactique 2, le rythme maximal soutenable où le lactate reste stable. Les athlètes d’endurance bien entraînés peuvent généralement maintenir cette intensité pendant 30 à 40 minutes.
Les différents types d’intervalles et leurs adaptations

Zone 2 : Entraînement aérobie de base
Intensité : Zone 2
Durée du travail de qualité : 40-90 minutes
Ratio travail/repos : Continu
Adaptations recherchées : Oxydation maximale des graisses, développement de la base aérobie
L’entraînement en zone 2 cible principalement la production d’énergie aérobie. Cette zone permet une oxydation maximale des lipides et constitue la base du développement aérobie.
Exemples d’entraînement :
- Course à pied ou cyclisme à allure conversationnelle pendant 60-90 minutes
- Sessions prolongées où vous pouvez maintenir une conversation sans être essoufflé
- Travail continu sans périodes de repos structurées

Entraînement au seuil (Threshold Training)
Intensité : Zone 3-4 (proche du seuil lactique)
Durée du travail de qualité : 20-40 minutes
Ratio travail/repos : 4:1 à 5:1
Adaptations recherchées : Amélioration du seuil lactique, capacité à maintenir une intensité élevée
Ce type d’entraînement se situe autour de votre FTP ou légèrement au-dessus. L’objectif est d’augmenter votre capacité à travailler à des intensités élevées sans accumulation excessive de lactate.
Exemples d’entraînement :
- 3 x 10 minutes à 95-105% du FTP avec 2-3 minutes de repos
- Intervalles de 20 minutes à intensité de seuil
Pour les sports fonctionnels :
- Rounds de 10 minutes enchaînant 200m de course, 15 calories au rameur, 20 wall balls et 25 double-unders
- Répéter 2-3 fois avec 2 minutes de repos entre chaque round
Cette approche développe votre capacité à maintenir une intensité élevée et améliore l’élimination du lactate.

Entraînement VO2 max
Intensité : Zone 5 (90-100% du VO2 max)
Durée du travail de qualité : 12-20 minutes
Ratio travail/repos : 1:1 à 2:1
Adaptations recherchées : Amélioration du VO2 max, capacité cardiovasculaire maximale
Ces intervalles ciblent votre capacité aérobie maximale. Bien qu’intenses, ils sont légèrement moins extrêmes que le sprint training.
Exemples d’entraînement classiques :
- 5 x 4 minutes à 90-95% du VO2 max avec 3-4 minutes de récupération active
Exemples pour le fitness fonctionnel :
- “Tabata modifié” : 8 rounds de 30 secondes d’effort intense (burpees, assault bike) suivis de 30 secondes de repos
- EMOM (Every Minute On the Minute) pendant 12 minutes : 15 calories assault bike + 10 box jumps
Ces séances améliorent significativement votre système cardiovasculaire et votre tolérance au lactate.

Zone 6 : Sprint et puissance maximale
Intensité : Au-delà du VO2 max
Durée du travail de qualité : 10 minutes (total)
Ratio travail/repos : 1:4 à 1:5
Adaptations recherchées : Puissance anaérobie, resynthèse de la phosphocréatine, recrutement neuromusculaire
Cette zone correspond aux efforts maximaux de très courte durée, bien au-delà de votre seuil ou VO2 max. Elle inclut les sprints et peut également englober l’entraînement en force.
Adaptations physiologiques :
- Amélioration de la resynthèse de la phosphocréatine
- Développement du système anaérobie
- Amélioration de la capacité de tamponnage du lactate
- Amélioration du recrutement des fibres musculaires (activation des enzymes PFK et LDH)
- Optimisation du taux de déclenchement neuromusculaire
Exemples d’entraînement :
- 5 x 30 secondes all-out sur air bike avec 2-3 minutes de repos complet
- Sprints répétés de 10-20 secondes avec 60-90 secondes de récupération
Exemple pour le fitness fonctionnel : Toutes les 4-5 minutes pendant 4 rounds :
- 12 calories air bike (9 pour les femmes)
- 10 wall balls (charge moyenne à lourde)
- 10 jumping lunges
Cette séquence prend environ 45 secondes à 1 minute, suivie d’une longue période de repos. Ce format permet de recruter toutes les fibres musculaires et d’apprendre à resynthétiser rapidement la phosphocréatine, un élément crucial pour les athlètes de CrossFit et de sports fonctionnels.
Intensité et récupération : trouver l’équilibre
La manipulation de l’intensité est fondamentale car elle impacte directement la récupération nécessaire.
Entraînement de faible intensité (Zones 1-2) :
- Volume élevé possible (2-4 heures)
- Contrainte physiologique faible
- Récupération rapide
- Possibilité de s’entraîner à nouveau le lendemain
Intensité intermédiaire (Zone 3) :
- Durée moyenne à élevée
- Contrainte et adaptation modérées à élevées
- Récupération intermédiaire
Entraînement au seuil (Zone 4) :
- Contrainte physiologique importante
- Adaptations significatives
- Besoin de récupération substantiel
- Les athlètes d’endurance cherchent à travailler précisément à ce niveau pour maximiser les adaptations sans sur-fatigue
Haute intensité (Zones 5-6) :
- Travail de haute qualité
- Contrainte physiologique très élevée
- Nécessite une récupération importante
- Après une session de sprint ou un entraînement lourd, un jour de repos ou une séance légère est recommandé
Application pratique et périodisation
Intégration dans un plan d’entraînement
L’organisation de ces différents types d’intervalles dépend de la périodisation de votre saison :
Phase de base (loin des compétitions) :
- Focus sur le travail aérobie de faible intensité
- Construction de la base cardiovasculaire
- Intégration avec l’entraînement en force
Approche des compétitions :
- Augmentation progressive du travail au seuil
- Introduction du training VO2 max
- Intégration du sprint interval training (même pour les athlètes Hyrox)
Conseils pour concevoir vos entraînements
- Ne vous limitez pas aux formats traditionnels : Plutôt que de toujours faire des WODs “for time” ou des AMRAP, réfléchissez à comment ajuster votre entraînement pour cibler des zones spécifiques.
- Soyez créatif : Utilisez les principes des zones d’entraînement pour créer des workouts fonctionnels qui ciblent des adaptations précises.
- Gérez votre récupération : Alternez les séances de haute intensité avec des jours de récupération ou de faible intensité.
- Soyez spécifique : La spécificité du mouvement est cruciale dans tous les sports. Entraînez les mouvements et les schémas énergétiques que vous utiliserez en compétition.
Tableau récapitulatif
| Type d’entraînement | Intensité des efforts | Durée des efforts | Progression VO2max (%) | Durée de l’intervention (semaines) | Gain typique sur VO2max (%) | Population étudiée | Particularités physiologiques |
|---|---|---|---|---|---|---|---|
| SIT (Sprint Interval) | Très intense (all-out, >90%) | 10-60 s | Pic rapide (2-3 semaines puis plateau) | 2-12 | 4,2 à 13,4 | Sédentaires, sportifs, les deux | Pic initial marqué, adaptations périphériques |
| HIIT (High Intensity) | Intense (~80-100% VO2max) | 60-300 s | Progrès progressif sur 8-12 semaines | 2-12 | 3,6 à 26,7 | Toutes populations | Progression continue, adaptations centrales |
| Endurance continue | Modérée (60-70% VO2max) | >10 min | Progrès graduel, longitudinal | 6-48 | 3,6 à 5,3 | Sportifs, sédentaires | Capillarisation, redistribution sanguine |
Conclusion
L’entraînement par intervalles offre un outil puissant pour optimiser vos performances sportives. En comprenant les différentes zones d’entraînement et leurs adaptations spécifiques, vous pouvez concevoir des programmes d’entraînement plus intelligents et plus efficaces.
La clé réside dans la manipulation appropriée de l’intensité, de la durée et des périodes de repos pour cibler les adaptations souhaitées tout en gérant adéquatement votre récupération. Que vous soyez coureur, cycliste, pratiquant de CrossFit ou athlète Hyrox, ces principes peuvent s’appliquer à votre discipline pour vous aider à progresser plus rapidement.
N’oubliez pas que la périodisation de ces différents types d’entraînement au cours de votre saison est tout aussi importante que l’exécution correcte de chaque séance. Un équilibre entre le travail de base, le développement du seuil et les efforts de haute intensité vous permettra d’optimiser vos adaptations physiologiques et d’atteindre vos objectifs de performance.


